Maine-et-Loire
Un programme qui a de l’avenir
Depuis sept ans, la MSA de Maine-et-Loire propose le programme d’accompagnement l’« Avenir en soi » aux personnes qui traversent une période de bouleversement professionnel ou personnel. Après évaluation auprès des participants, le programme n’est pas prêt de s’arrêter.
« Un tremplin pour sortir de la tempête. » Ce 19 juin, à Beaucouzé, les participants à l’Avenir en soi ne tarissent pas d’éloges sur le programme proposé par la MSA. À la veille du renouvellement de son plan d’action sanitaire et sociale, la caisse de Maine-et-Loire a souhaité évaluer cette action auprès des premiers intéressés. Elle a invité les 175 personnes qui y ont participé depuis 2008 pour faire le point.
Laisser libre cours à ses émotions
Saisonniers, salariés, exploitants, conjoints d’exploitants agricoles… gardent un très bon souvenir de leur groupe d’échange. « Cela m’a permis de sortir d’un tunnel dont je ne voyais pas le bout », témoigne une participante, ouvrant la voie aux autres : « J’ai repris confiance en moi », « j’ai appris à valoriser mes qualités », « j’ai réussi à envisager un avenir professionnel dans un autre domaine ». Lors des rencontres, la peur d’être jugé par les autres a laissé rapidement place à la confiance. Certains se sont même surpris à laisser libre cours à leurs émotions : « J’ai parlé. J’ai pleuré. L’Avenir en soi ça vaut bien une séance chez le psy ! »
J’ai redécouvert le partage, et surtout le respect
Marie-Noëlle et Alain s’emparent du micro pour raconter. Elle, ancienne salariée du secteur bancaire, souffrant d’une maladie chronique et sous pression continue au travail, se fait licencier « pour raison de santé, après 37 ans de maison. » Et un malheur n’arrivant jamais seul, elle doit en plus faire face à des difficultés économiques. Les travailleurs sociaux de la MSA lui proposent alors de participer au programme l’Avenir en soi. Elle décline l’invitation ̶ « Je ne m’en sentais pas la force : il fallait assez d’énergie pour s’exposer devant un groupe » ̶ avant de se laisser convaincre un an après. Un choix qu’elle ne regrette pas : « J’ai vécu des moments formidables de partage […]. Quand j’ai arrêté mon travail je n’étais plus moi, j’étais sans consistance. Les choses se sont libérées progressivement et j’ai fini par me retrouver. »
Elle reprend petit à petit des forces grâce au regard bienveillant du groupe et décide d’offrir ses services de comptable à une association. Une activité qui lui permet de se sentir à nouveau utile. Aujourd’hui, à soixante ans, Marie-Noëlle estime que « la boucle est bouclée ». Elle prend sa retraite cette année et termine sa carrière sur une expérience positive.
Ouvrir le champ des possibles
Alain lui aussi a frôlé le burn out. Ancien chef d’exploitation agricole et responsable d’une plate-forme logistique, il supporte mal la pression continue imposée par son métier. Il décide de quitter son poste il y a un an. Une décision difficile à prendre. « À 53 ans, je n’avais aucune garantie de retrouver un emploi. Mais j’avais un projet : suivre une formation pour devenir chauffeur routier. En participant au groupe de l’Avenir en soi, j’ai redécouvert le partage mais surtout le respect, qu’on ne trouve pas beaucoup en entreprise où on est souvent pris pour un pion. » Aujourd’hui, Alain sillonne les routes de France au volant de son neuf tonnes. Avec le sourire.
Les résultats sont là. Mais ils ne sont pas le fruit du hasard. Les travailleurs sociaux qui animent les groupes sont formés au niveau national sur le dispositif. Ils appliquent un principe de base : faire ressortir les capacités que les personnes ont su mettre en œuvre à un moment de leur vie, pour les réutiliser dans cette période de changement au profit d’un nouveau projet. Les candidats sont reçus individuellement avant d’intégrer un groupe pour s’assurer qu’ils ont le profil : « Ils doivent manifester l’envie d’aller de l’avant mais aussi d’aider les autres qui vont être dans le même groupe qu’eux », déclare Claire Cadot, coordonnatrice de l’action à la MSA de Maine-et-Loire.
Pour Dominique Sinner, formatrice des travailleurs sociaux pour le programme, ce qui se joue dans l’Avenir en soi, c’est le processus de restauration. « Les participants arrivent dans un état d’épuisement. Ils pensent ne plus être capables, un peu comme s’ils avaient couru plusieurs marathon d’affilée. » Entre deux courses, une période de récupération est nécessaire pour reprendre des forces et repartir. C’est ce que font les participants à l’Avenir en soi, avec l’aide du groupe. « Quand la montagne est devant nous, elle semble loin. Mais il nous manque juste l’impulsion pour la gravir. C’est ce qu’apporte le groupe de l’Avenir en soi », résume Marie-Noëlle.
Témoignage
Sylvie Prévost et Micheline Houdou, travailleurs sociaux, animatrices des sessions l’Avenir en soi depuis 2008.
« Avec l’Avenir en soi, nous nous appuyons sur les acquis de l’expérience pour mobiliser les savoir-faire et les connaissances. Cette reconnaissance des acquis est particulièrement utile pour les personnes qui n’ont pas de diplômes ou de qualification et qui craignent de ne pouvoir se reconvertir dans quoi que ce soit. Nous avons par exemple le cas d’agriculteurs qui cessent leur activité et qui pensent ne rien savoir faire d’autre.
Pourtant, au sein de leur métier, ils développent une multitude de compétences qu’ils peuvent mettre au service d’autre chose. Les personnes doivent identifier chez elles ce qui fait force, ce qui est pilier et sur quoi elles peuvent s’appuyer pour construire un nouveau projet. Parce que de toute expérience on peut retirer des compétences, des aptitudes, des qualités. Même au travers d’événements difficiles et négatifs, il y a toujours, à la marge, des ressources qui sont mobilisées.
La démarche ici est collective. Les personnes échangent en petits groupes, ça fonctionne très bien. D’abord, parce que nous posons dès le départ un cadre éthique très précis sur le respect, le non-jugement, la confidentialité… et aussi parce que les gens se reconnaissent dans les histoires des uns et des autres, ça les met en confiance. Certains se lient même assez facilement dès les premiers jours. Souvent, les personnes redécouvrent leurs propres capacités grâce aux autres. Reste alors à se les approprier. Le groupe est vraiment une force. »